#87 Comment soutenir son enfant lorsque qu’il souhaite partir vivre à l’étrangers (Part 2)

immigration maman

Kelly : Salut à toi et ravie de te retrouver pour la deuxième partie de cet épisode.

Pour rappel, dans la première partie, j’ai eu le plaisir d’échanger avec Monique, la maman de Marine.

Marine est partie vivre seule à Toronto depuis plusieurs années.

L’un des messages forts que je retiens de Monique, c’est que pour elle, quand un enfant décide de partir, il ne faut surtout pas voir ça comme une séparation.

En tant que parent, il est préférable de se demander comment aider son enfant à se différencier s’il ressent le besoin d’aller vivre une expérience à l’étranger ou

du moins, loin du cocon familial.

Pour elle, en tant que parent, on ne peut donner que deux choses à son enfant.

C’est des racines, pour se sentir solide et aimé, et des ailes, pour leur donner la

capacité de développer des outils pour s’affirmer et s’épanouir pleinement.

Et maintenant, c’est à Valérie que j’ai voulu tendre mon micro, car Valérie, c’est en Syrie qu’elle a dû voir sa fille partir seule.

Dans l’épisode 62, Charlotte t’explique pourquoi elle a choisi la Syrie, et maintenant, nous allons découvrir ensemble comment sa maman a réagi à cette annonce.

Bonjour Valérie, tellement heureuse que tu aies accepté mon invitation, car depuis presque un an, on se suit sur Instagram et on échange de façon assez régulière, donc je suis vraiment heureuse de te présenter à la communauté de Fill’Expats, comment tu vas?

Valérie : Bonjour, ça va, heureuse de participer à ce podcast, je ne me rendais pas compte que ça faisait aussi longtemps en fait, mais c’est bien, on a enfin trouvé le bon créneau.

Kelly : Oui, parce qu’il y a presque un an, je dirais presque même jour pour jour, j’aurais dû vérifier, c’était à Charlotte que je tendais mon micro, et depuis que son épisode est sorti, du coup, on a commencé à se suivre.

J’aimerais bien justement reparler de ce témoignage, est-ce que tu te souviens quand tu l’as écouté, et comment tu as réagi à l’écoute de son témoignage?

Valérie : Je me souviens quand je l’ai écouté, j’avais beaucoup d’émotions, j’étais assez émue, je connais très bien son histoire, forcément, je la suis, je la vis avec elle, voilà, c’était beaucoup d’émotions de l’entendre parler dans un condensé en fait, de toute son histoire, de ses difficultés, même si on échange beaucoup sur ses difficultés, et puis j’ai été très fière d’elle, je le suis tout le temps, mais j’ai d’ailleurs partagé largement le podcast à ce moment-là.

Kelly : Trop bien, d’ailleurs, j’ai dit j’ai hâte de te présenter, mais au final, je ne te présente pas vraiment, je rentre tout de suite dans le vif du sujet, donc peut-être on va refaire un petit retour en arrière.

Est-ce que tu pourrais peut-être nous dire où tu vis, qu’est-ce que tu fais dans la vie, et puis les petites choses que tu as envie de partager?

Valérie : Alors, je m’appelle Valérie, donc je suis la maman de Charlotte et de son frère Hugo.

Donc Charlotte a enregistré un épisode, puisqu’actuellement elle habite en Syrie depuis deux ans et demi, donc moi j’ai 57 ans, je suis cadre de santé dans un grand hôpital psychiatrique, dans le sud de la France, nous habitons à côté d’Avignon, et je suis en parallèle professeur de yoga ici depuis deux ans maintenant, et voilà, c’est mon art de vivre, le yoga.

Kelly : Trop bien, vive le yoga! D’ailleurs, alors, on parle de Charlotte qui est partie en Syrie, mais le départ de Charlotte en Syrie n’était pas son premier départ, elle avait déjà expérimenté la vie à l’étranger.

Est-ce que t’arriverais à te souvenir de la toute toute première fois où Charlotte a pris cette décision de partir de la maison, mais surtout de partir de la France? Est-ce que tu te souviens comment elle vous l’a annoncé ou comment as-tu réagi à cette annonce?

Valérie : Alors, le tout premier départ, c’était quand elle était à la fac en Erasmus, où elle est partie pour Berlin, un an, puisqu’elle a réussi à avoir deux semestres à l’université de Berlin, donc ça a été vraiment son premier départ de la maison, ça a été très dur, je l’ai très très mal vécu, c’était mon premier enfant qui quittait le nid, on sentait bien qu’on passait quelque chose, donc ça a été assez difficile, les communications à l’époque n’étaient pas aussi faciles qu’aujourd’hui, on avait Skype, donc on arrivait à parler par Skype assez régulièrement, j’avais pas de réseau de réseaux sociaux comme aujourd’hui, donc c’était un petit peu plus difficile, donc elle est partie un an à Berlin, ça a été vraiment le premier départ de la maison, ensuite elle est revenue, elle a fini ses études, elle a fait des choses et d’autres, et ensuite le deuxième départ, ça a été pendant sa dernière année de master, elle est partie au Maroc, à Ouarzazate, mais en fait elle avait déjà quitté la maison, elle avait déjà son appartement, et puis le Maroc, voilà, c’était à côté, elle partait trois mois, donc ça allait, et ensuite il y a eu le départ à Moscou, je passe les voyages en solo, cinq semaines sac à dos en Chine, la Suède, la Norvège, au moment de l’attentat qui avait eu lieu en Norvège, voilà.

Kelly : Est-ce que du coup à chaque fois tu allais lui rendre visite ou pas du tout?

Valérie : Alors à Moscou, on avait prévu d’y aller avec son papa, et puis les rentrées plutôt que prévues, voilà, le Maroc, la première fois, on n’a pas pu, c’était trop court au niveau des vacances, le Caire, oui, je suis allée la voir au Caire, c’était d’ailleurs un de mes rêves d’aller en Égypte, donc ça a été un émerveillement, et puis cette année-là, j’avais réalisé un autre de mes rêves, puisque j’étais allée en Inde en début d’année, et en fin d’année, j’étais allée au Caire, donc ça a été une très belle année, et là, effectivement, après sur les autres voyages qu’elle a fait, elle était en itinérance, sur le grand voyage qu’elle a fait dans le Moyen-Orient, elle était en itinérance et ce n’était pas possible de la rejoindre, c’était compliqué à ce moment-là, et là, effectivement, il y a le projet d’aller la voir à Damas très prochainement, donc on croise les doigts, parce que ce n’était pas simple, mais oui, j’essaie en tout cas.

Kelly : Est-ce que tu dirais qu’à chaque départ, ou à chaque fois qu’elle prévoyait en tout cas un voyage ou un départ à l’étranger, est-ce que tu dirais qu’à chaque fois l’annonce était un petit peu plus facile à digérer, ou la peur et les questionnements étaient toujours omniprésents?

Valérie : Non, maintenant, c’est quelque chose d’acté, Charlotte vit à l’étranger, elle part, et après, effectivement, moi, j’aime bien quand elle habitait à Avignon, qu’on se voyait régulièrement, mais non, maintenant, on sait, elle habite à l’étranger, c’est comme ça, on l’a tous accepté, et c’est toujours un peu compliqué, les premières heures après son départ, il y a toujours un petit flottement, mais non, non, ça va, c’est où tu vas habiter maintenant, c’est la question.

Kelly : Et son frère et son papa, comment ils réagissent?

Valérie : Son papa, il s’est habitué à l’idée qu’elle habitait à l’étranger aussi, et son frère aussi, son frère habite la région parisienne, donc il n’habite plus ici non plus, ils sont en lien aussi, c’est comme ça, oui, on a accepté cet état de fait, elle n’habite pas en France, je ne sais pas s’il y habitera à nouveau un jour, mais c’est comme ça, c’est sa vie, son choix, donc on le respecte, bien évidemment, et on la soutient.

Kelly : Et du coup, l’annonce de la Syrie quand même, parce que là, on part quand même dans un territoir dit en guerre, dont on voit les images à la télé, elles ne donnent pas forcément envie, donc comment avez-vous réagi?

Valérie : La Syrie est en guerre, le pays n’est plus officiellement en guerre, en tout cas sur la région où elle habite, il y a encore des conflits sur le nord de la Syrie, mais quand elle m’a annoncé ce poste en Syrie, moi je lui ai dit fonce, je l’ai encouragée, je lui ai dit fonce, ça me semblait évident dans son parcours que le challenge était pour elle, et ça correspondait vraiment à ce qu’elle souhaitait faire, et quelle chance, moi je me suis dit, quelle chance de pouvoir aller là-bas, et puis de toute façon, si ça ne le fait pas, elle revient, elle est à côté du Liban, donc voilà, parce que la problématique d’une enfant, de quelqu’un qui habite en Syrie, c’est qu’il n’y a pas d’ambassade, voilà, on ne peut pas prendre l’avion comme ça pour aller à Damas, c’est tout un périple, donc voilà, je dirais que c’est la seule solution, mais moi je l’ai encouragée à faire ce qu’elle avait envie de faire, et à aller à Damas, en tout cas à postuler dans un premier temps, et je l’ai accompagnée, enfin on l’a accompagnée dans sa décision.

Kelly : Super, parce qu’à mon avis, ce n’est pas donné à tout le monde d’encourager, déjà d’encourager un enfant à partir, ça ne doit pas être facile en tant que parent, mais en plus l’encourager à partir dans un pays comme la Syrie.

Valérie : On avait quand même eu des épisodes avant assez rocambolesques, quand elle était à Moscou, elle a quand même failli se faire agresser plusieurs fois à Moscou, voilà, et puis je l’ai vue vivre au Caire, je suis allée la voir au Caire, je l’ai vue vivre au Moyen-Orient, donc je sais ses capacités à s’insérer dans la population, à se débrouiller, je me souviens quand je suis revenue du Caire, j’ai dit à son père « non mais tu peux être tranquille, c’est bon, elle peut vivre là-bas, il n’y a pas de souci, elle est à l’aise, même si c’était difficile pour elle, parce que c’est compliqué de vivre dans des grandes mégapoles comme ça, elle a cette chance aussi de parler la langue, donc ça facilite aussi son quotidien.

Au Caire, elle était très entourée, elle a beaucoup d’amis là-bas et je crois que c’est pareil en Syrie, elle a cette capacité à se créer beaucoup d’amis.

Après, on a vécu aussi le passage par la Palestine et là, par contre, bien sûr, c’était son rêve d’aller en Palestine, bien sûr qu’on l’a encouragée à y aller, on l’a soutenue, mais ce passage où elle était en Palestine, c’est là où vraiment j’ai eu, par moments, assez peur, puisqu’elle s’est quand même frottée dans des situations un peu compliquées avec l’armée israélienne en défendant le droit des Palestiniens, même son papa, on n’était pas toujours serein, quand elle est rentrée, on s’est sentie vraiment soulagée.

Après, elle est repartie en Égypte, mais on savait qu’elle était capable de vivre là-bas.

Kelly : Donc du coup, si là, je te pose la question de si tu pouvais aujourd’hui t’adresser un message à toi-même le jour où justement elle t’a annoncé qu’elle voulait postuler pour ce poste, est-ce que tu te passerais un message ou pas du tout?

Valérie : Non, non, de continuer à lui faire confiance, parce qu’il y a beaucoup de confiance dans notre relation, de continuer comme on l’a toujours fait et comme on fait avec son frère, c’est-à-dire de les encourager dans leurs projets.

Charlotte est quelqu’un qui réfléchit, qui ne va pas à l’aveuglette, qui prend des garanties quand elle part dans un endroit, se renseigne.

Elle m’a dit, tu sais, maman, Damas, c’est safe, ne t’inquiète pas, il n’y a plus la guerre.

Bon, après, je me tiens un petit peu au courant de l’actualité quand même.

Ce qui est compliqué avec la Syrie, c’est les conditions de vie, ce qu’elle vit au quotidien.

En ce moment, elle a trois heures d’électricité par jour et l’inflation, on se plaint en France, de l’inflation, là, c’est encore à un autre niveau.

C’est plus à ce niveau-là que c’est compliqué.

Je ne dirais pas que je m’inquiète pour elle, mais bon, voilà, c’est comme toute maman, on n’a pas trop envie que nos enfants vivent dans des conditions comme ça.

Mais après, c’est un choix qu’elle fait, elle le dit et puis si vraiment ça ne lui va pas, elle partira, elle fera autre chose.

C’est vraiment l’encourager, lui faire confiance comme on le fait.

Je crois que c’est important pour elle, justement, de continuer à pouvoir être là et puis on est là.

Voilà, s’il y a quoi que ce soit, s’il faut qu’elle revienne, on est là.

Ce qui s’est passé d’ailleurs avec la pandémie, puisqu’elle était au Caire quand les frontières se sont fermées.

On lui a dit, tu rentres, il faut rentrer, parce que ce qui nous attend, là, on ne sait pas trop, mais on comprend bien que ça ne va pas être simple.

Voilà, elle est rentrée, elle a passé six mois à la maison, elle s’est posée, c’est être là.

Kelly : Donc, elle a toujours une chambre chez vous?

Valérie : Oui, oui, oui, oui.

Alors, c’est la chambre d’amis, mais quand elle vient, en fait, c’est la chambre de Charlotte, mais oui, oui, oui, bien sûr, il y a toujours une chambre pour elle.

Kelly : Et si aujourd’hui, tu pouvais justement adresser un message à une maman qui vient d’apprendre que sa fille va partir, que ce soit en Syrie ou ailleurs, peu importe, est-ce que tu voudrais lui donner un conseil sur comment prendre la nouvelle? Parce que je sais que un départ, ça peut-être un peu, je ne sais pas, frustrant ou il peut peut-être avoir un manque de compréhension pour les parents, pourquoi mon enfant voudrait partir de la maison ou partir en tout cas de notre village ou de notre région? Est-ce que toi, tu aurais un petit message à lui passer à cette maman?

Valérie : C’est ce que je disais tout à l’heure, c’est de leur faire confiance et d’être là.

Je travaille en psychiatrie, un jour, je discutais avec une amie psychologue et je lui disais mais est-ce que j’ai loupé quelque chose dans l’éducation de Charlotte pour qu’elle ait envie de partir comme ça tout le temps? Et cette amie a dit mais non, pas du tout, au contraire, tu lui as donné suffisamment de force pour qu’elle puisse partir explorer le monde, c’est une grande chance que tu lui as donné de pouvoir faire ça.

Donc j’ai toujours cette phrase en tête en me disant, voilà, cette envie d’explorer le monde, c’est extraordinaire, c’est une chance de pouvoir la vivre, donc en tant que parent, il faut l’accepter et accompagner, c’est pour moi le plus important pour les parents.

Et puis, je crois qu’en tout cas pour moi, il y a eu un grand changement dans ma façon de percevoir le danger après les attentats de 2015.

On a eu en France les attentats avec des gens qui étaient à Paris, sur les terrasses, à un concert, qui sont morts, des jeunes.

Oui, ma fille habite en Syrie, elle habite au Moyen-Orient, mais à l’heure actuelle, est-ce qu’elle est plus en danger que son frère qui prend le métro tous les jours à Paris ? Ou des jeunes qui prennent une voiture pour aller travailler, on sait que les gens se tuent le plus près de leur domicile, voilà, c’est ça.

Donc c’est de relativiser et d’entendre que de toute façon, ça ne sert à rien de s’inquiéter pour ce qu’on ne peut pas changer.

Donc c’est un état de fait, il faut que les enfants vivent, on ne peut pas les garder sous cloche et il faut accepter ça, voilà.

Kelly : Non, mais t’as trop raison dans ce que tu dis, c’est que maintenant, on est en danger partout, malheureusement, c’est un triste monde, donc autant profiter du moment présent et surtout essayer de vivre ce qu’on a envie de vivre, c’est mieux de vivre nos rêves plutôt que de vivre avec des regrets, donc du coup, je trouve que t’as tout à fait raison.

Et donc si une fille, une femme qui nous écoute aujourd’hui doit justement passer un message à sa maman, elle ne sait pas comment le faire, qu’est-ce que tu lui dirais à cette femme, comment elle devrait lui annoncer à sa maman?

Valérie : Avec sincérité. Peut-être remercier sa maman de lui permettre d’avoir cette force justement, de pouvoir aller explorer d’autres choses à l’extérieur et qu’elle l’en remercie de lui donner cette force-là et puis à quel point c’est important pour elle.

C’est un rêve, c’est une envie.

Après, je ne crois pas que ça arrive comme ça du jour au lendemain, les caractères des enfants sont un peu dessinés dans l’enfance.

Moi, je vois Charlotte quand elle était petite, elle était très indépendante, elle avait toujours de l’avant et ça se voit dans sa vie d’adulte, son frère n’est pas du tout le même.

Donc, ce n’est pas une surprise.

Le Moyen-Orient a été une surprise parce que comme elle le disait dans son podcast, quand elle était ado, elle voulait être styliste à Londres.

Et puis, je crois qu’elle rêvait du Canada aussi, parce qu’à un moment donné, j’ai essayé de la faire venir, je lui disais « allez, s’il te plaît ».

Je ne sais pas si elle avait envie d’y vivre, c’était surtout ado, c’était vraiment Londres, elle était allée en séjour linguistique à Londres en fait, on lui avait offert ça à lieu d’avoir 16-17 ans, je ne sais plus, elle était partie trois semaines et on a posé des graines.

Et elle est revenue, c’est Londres, c’est fabuleux et tout ça, bon, parce qu’elle a toujours aimé l’anglais.

Donc, voilà, on avait bien compris qu’elle n’habiterait pas à la maison à côté de chez papa et maman.

Et finalement, elle est passée de styliste à Londres à parler anglais, à être prof au Damas et à parler l’arabe.

Alors, à parler plusieurs dialectes arabes, puisqu’elle parle l’égyptien, le syrien, elle est capable de se faire comprendre bien évidemment en allant en Jordanie, elle nous impressionne.

Kelly : Est-ce que toi t’arrives à comprendre justement, qu’est-ce qui a amené cette passion pour le Moyen-Orient chez Charlotte?

Valérie : Elle l’explique, il y a eu un changement quand elle est allée à Ouarzazate où elle a découvert le Maroc, mais je dirais que le plus gros changement, ça a été avec le Caire.

Il y a vraiment eu quelque chose qui s’est passé à ce moment-là, elle est revenue parce que c’était au moment de son master, elle devait finaliser son master et elle est repartie en nous disant je repars.

Donc là, on s’est dit bon, il se passe quelque chose et puis elle avait des choses à vivre.

Elle les a vécues à ce moment-là, oui.

Kelly : Je ne sais pas si elle l’explique vraiment…quel est ce trait de personnalité qui fait qu’elle a choisi le Moyen Orient ? Je sais qu’elle a eu un déclic quand elle était dans ces pays, c’est ce que j’ai compris en échangeant avec elle, mais je ne suis pas certaine qu’elle ait vraiment compris le pourquoi au fond, elle a cette attirance pour le Moyen-Orient.

Valérie : Je ne sais pas pourquoi elle a cette attirance, est-ce qu’on sait pourquoi on a une attirance pour une culture, un pays, une civilisation? Je ne sais pas.

En tout cas, ce qu’elle a vécu au Caire, cette première fois où il est allé lui a donné envie de rester, d’aller plus loin en fait dans la connaissance de ce pays, des gens.

Déjà, quand elle voyageait, elle a toujours voyagé comme ça en fait, en sac à dos, en rencontrant les gens, donc c’était vraiment cette envie d’aller plus loin, de plus comprendre.

Puis, c’était peu de temps après la Révolution, donc il se passait des choses, puis elle a rencontré des jeunes révolutionnaires, elle a discuté, donc elle se confrontait avec des idéaux aussi d’adolescent quand on parlait de la Palestine, des Palestiniens, tout ça.

Donc, elle touchait, elle sentait, je pense, que ce qu’elle voyait, ce qu’elle vivait, ce que les gens vivaient, ce qu’ils pouvaient lui dire, c’était assez exceptionnel quand même dans cette période.

Donc, c’est peut-être un peu son côté révolutionnaire ou à vouloir défendre des causes.

Kelly : Parce que tu vois, moi, par exemple, même si j’adore aider, j’ai envie de partager, etc., je ne suis pas sûre que je serais capable de faire ce qu’elle fait aujourd’hui, surtout de vivre dans les conditions où elle vit aujourd’hui.

Moi, je dis toujours en rigolant, parce que moi, j’ai une attirance pour l’Amérique du Nord, je devais être dans une vie antérieure, je devais être américaine ou canadienne, je ne sais pas.

Mais en réalité, moi, je sais que je suis attirée par ces pays parce que c’est à ce moment-là, quand je suis partie vivre à l’étranger, que j’ai eu l’impression que je me suis découverte une nouvelle personne. Là, je n’étais plus Kelly qui a grandi en France, etc., je suis devenue une autre femme. Et je pense que c’est pour ça que je me sens bien, parce que du coup, je suis une autre personne. Donc, je ne sais pas.C’est juste pour ça que je te posais la question.

Valérie : Je ne sais pas.

En tout cas, on l’a vu s’épanouir et vraiment là, depuis qu’elle est en Syrie, elle est encore passée dans un autre niveau de son développement personnel, ça, c’est sûr. C’est bien difficile, elle est capable de capter les choses de ce pays, les belles choses de ce pays, sans ignorer, bien évidemment, les côtés difficiles, puisqu’elle le vit au quotidien.

Mais elle est capable de capter ça, en fait.

Kelly : Une question que je voulais également te poser, c’est est-ce que tu penses que les parents d’enfants qui vivent à l’étranger doivent faire un effort supplémentaire pour assurer un bon rapport parent-enfant?

Valérie : Oui, il faut être disponible.

Les petits messages « Maman, t’es disponible ? ». On comprend bien qu’il faut « Oui, oui, oui, vas-y! » ou « À quelle heure? »

Oui, c’est important, d’autant plus quand on vit, quand l’enfant vit dans un pays comme ça, il faut qu’il se sente, je pense, écouté et pouvoir, à un moment donné,

être rassuré par les parents.

Oui, je pense que c’est très important.

Et comme je le disais, maintenant, avec les réseaux sociaux, c’est vrai qu’on se connecte beaucoup, on peut s’envoyer juste des petits messages dans la journée.

Des fois, je n’ai pas de message, mais je vois qu’elle a été connectée, donc je sais qu’elle va bien.

Je sais que tout va bien.

Et puis, le fait d’aller la voir, d’aller là où elle vit, c’est aussi la voir différemment.

Parce qu’elle m’a trimballée au Caire, parce que moi, je ne comprenais pas du tout l’arabe, je n’étais pas du tout au fait, même si je suis très ouverte, ce n’est pas le pays où je découvrais ce pays, donc il fallait quand même qu’elle me donne les codes.

Je me retrouvais presque à la place de l’enfant quand il n’y avait pas sa maman dans ce pays.

C’était assez touchant et je l’ai vu qu’elle était tout à fait capable de se débrouiller.

Donc oui, il faut être là.

Il faut vraiment, on est toujours là en tant que parent, mais il faut être disponible, il faut être là parce qu’à un moment, juste le fait de pouvoir parler cinq, dix minutes avec maman, ça peut poser des choses et ça permet de repartir.

Kelly : C’est ça. C’est marrant parce que juste avant qu’on commence à enregistrer, j’ai envoyé un message vocal à ma maman pour lui demander un service.

« Maman, je t’envoie un message en vitesse avant de commencer l’enregistrement! » Ça facilite la vie là-bas, c’est important.

Valérie : Et puis pour nous, c’est important en tant que parent de garder cette connexion un peu parce qu’elle est autonome, elle est complètement autonome, mais bon, on se sent un peu utile aussi comme ça.

Kelly : Mais bien sûr, vous êtes utile, voyons! Mais oui, d’ailleurs, tu me disais même parce que je sais que les gens ne le savent pas, on en a parlé offline, que toi, tu es plus à vivre la nuit que le jour et que justement, tu ne peux même pas enlever ton téléphone de la chambre parce qu’il faut qu’il soit là au cas où que Charlotte veut t’appeler.

Je trouve ça trop cute.

Valérie : Ouais, ouais, ouais, mais il faut quand même que je me débarrasse un peu du téléphone.

C’est tous notre résolution 2023.

C’est ça. Notre téléphone. En fait, c’est le lâcher pendant des heures où il faut qu’on pense un peu plus à nous parce que sinon…

Kelly : C’est ça.

Valérie : Ouais, ouais, ouais, ouais.

Tout à fait.

On ne va pas s’en sortir.

Kelly : Ben écoute, moi, on a abordé tous les points, en tout cas, que je voulais aborder avec toi aujourd’hui. Est-ce qu’il y a autre chose que tu voudrais passer à la communauté de Fill’Expats ou à Charlotte ou à moi-même? Peu importe, tu as la parole.

Valérie : Non, non.

Pas plus.

Sinon dire que je suis très fière de mes enfants et de ma fille et que je la soutiens et que je te remercie beaucoup, en tout cas, pour cette interview un peu différente de ce que tu fais d’habitude.

Voilà.

J’espère que ça aidera d’autres mamans.

En tout cas, c’est toujours un plaisir d’écouter les podcasts, donc je m’y mets.

Là, j’ai un peu de retard.

J’ai beaucoup de retard, donc je m’y mets.

Voilà.

Je trouve ça très enrichissant et ça me servira pour de futurs voyages, sans doute.

Kelly : Je l’espère et il y a deux ans et demi de travail, donc oui, tu as du retard, mais c’est normal, prends ton temps.

Écoute, comme tu le sais, à la fin de chaque épisode, je demande à mon invitée de conclure avec sa citation ou chanson préférée.

Valérie : Alors, j’ai choisi une chanson, c’est One de U2, puisqu’elle dit « on est différents, mais on se porte, on se supporte, on s’aide chacun, les uns les autres ». Je pense que c’est un beau message.

Kelly : Super. Merci beaucoup, Valérie et merci, Charlotte. À très vite, Valérie.

Valérie : Merci.

Au revoir.

Merci beaucoup de nous avoir lu jusqu’au bout. 

Transcrit volontairement et avec amour par Kelly.